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5 mars 2017 7 05 /03 /mars /2017 19:20

MICHEL DEON : deux ou trois souvenirs personnels

 

Ce sont presque des souvenirs de jeunesse, en tous cas, de ceux qui remontent aux premières années de ma seconde vie, celle que le FATUM m'a fait commencer en venant de l'autre côté de la mer. Le nom de Déon ne m'était pas inconnu, mais ce n'était pas le romancier dont j'avais alors approché l'oeuvre, mais l'homme de conviction dans la mouvance royaliste et patriote. J'avais ainsi vu son nom dans la flamboyante revue « L'ESPRIT PUBLIC » qui avait ferraillé – à la Hussarde - contre le Général -Bourreau ( à ne pas confondre, SVP, avec le général Gouraud, soit dit un peu malicieusement pour mes jeunes lecteurs...S'il y en a ).

 

C'est ainsi que lors de mes déambulations parisiennes, qui donnèrent souvent une dimension poétique à mon exil, j'eus un jour – mais quand ? Je ne m'en souviens plus- mon premier livre de Michel Déon, en format de poche : « JE NE VEUX JAMAIS L'OUBLIER » . Sa lecture me plongea dans un esthétique bonheur qui, avec le recul d'un bon demi-siècle, fut centré sur une envoûtante Cité de Florence, souvenir aujourd'hui nimbé de brouillard doré, dans lequel se noie la trame de l'ouvrage, dont je ne sais plus rien. Plus rien, sauf une chose : son titre, ce titre qui m'a propulsé au-delà de la prose déjà élégante du romancier à ses débuts, me révélant à travers lui et par lui un poète qui allait susciter en moi un enthousiasme, que je garde intact au temps de ma « montée du soir », expression que j'emprunte à Déon. Ce poète ,ce fut, c'est Guillaume Apollinaire. En effet, ce « je ne veux jamais l'oublier » est le premier vers de la sixième strophe d' un poème figurant dans « ALCOOLS » débutant par « Voie lactée Ô sœur lumineuse » ( en pages 53 à 55 des Oeuvres poétiques d'Apollinaire, dans La Pléiade ). Voulez-vous vous embarquer en ma compagnie sur ce vaisseau de rêve piloté par Apollinaire, assisté de Déon ? Voici cette strophe :

« Je ne veux jamais l'oublier

Ma colombe, ma blanche rade

O marguerite exfoliée

Mon île au loin ma Désirade

Ma rose mon giroflier »

 

J'ajoute que, 3 strophes après, en tête d'une neuvième strophe, on trouve ce vers aussi impressionnant que lugubre :

« Malheur dieu pâle aux yeux d'ivoire.. »

Or, un autre roman de Déon, de la même époque, a pour titre : « LE DIEU PÂLE ». Tous deux figurent bien sûr dans la quinzaine de livres de Michel Déon qui sont dans ma bibliothèque .

 

Comme y figure également son ouvrage, paru en 2 parties (1955, puis 1960), dont j'ai l'édition globale, parue en 1967 : « TOUT L'AMOUR DU MONDE », sobrement qualifié de « récits », qui reprend , en tête, un poème d' Apollinaire, « Le chant d'amour », qui se termine par : « Il y a le chant de Tout l'amour du monde ».

 

Plus tard, j'appris, énoncé par une plume autorisée, que le poète préféré de Déon était Apollinaire. Je m'en serais douté !

 

Par contre, je réalise aujourd'hui seulement combien les prémisses de cette rencontre avec Michel Déon ont baigné dans un univers de poésie, sans doute en contre-point, voire en ligne de fuite, en ces années 60 qui ont suivi l'entrée en exil. Le thème de la Mer prend alors toute son importance affective, et même psychique, en tous cas sa résonance en moi. Surtout lorsqu'il s'agit de la Méditerranée. C'est à cette époque que je découvre l'oeuvre de Georges Séféris, dans laquelle je puise en les adaptant aisément des images élégiaques qui montrent que « la Grande Bleue » perpétue le destin des personnages d'Homère…

 

« Ici, nous avons jeté l'ancre pour réparer nos rames brisées... » écrit quelque part Séféris. Alors, comment aurais-je pu être surpris en découvrant à travers Déon, cette citation du même Séféris :

 

« Mais que cherchent-elles ces âmes à voyager ainsi

De port en port

Sur des coques pourries.. »

 

( « LES CAHIERS DE L' HERNE, DEON », p. 14 ).

 

Michel Déon, une fuite raisonnée autour du Monde, mais alors centrée sur la Grèce. Balisant une route insulaire. Je pourrais compléter : « d'une jetée l'autre »….Voilà qui préfigurait mon premier livre, celui que j'avais commencé sans l'écrire, et que je n'ai en réalité jamais terminé…

 

Et la Grèce fit son entrée dans ma bibliothèque, mais plus encore, dans ma tête et dans mes tripes, avec « LE BALCON DE SPETSAI » qui reste en moi, longtemps, longtemps, parce que la réalité a rejoint , non la fiction, mais le récit, et que les personnages de Déon qu'il meut en scène – je veux parler de ces Grecs de Spetsai – je les ai vus, je les ai rencontrés, et que j'ai même leurs visages dans mon album de souvenirs de 1971….

 

Mais, n'anticipons pas ! J'ai effectivement lu ce merveilleux récit vers la fin des années soixante, juste avant la découverte flamboyante des célèbres « PONEYS SAUVAGES », à leur parution en 1970.

 

Il ne peut être question d'évoquer ici ce roman qui, aux yeux de tout le monde de la littérature constitue « la marque » de Michel Déon, même si l'abondance de sa production littéraire, au sens le plus large du terme, ne peut être réduite à n'être que l'ombre de ce livre-culte – je songe au cas, que j'estime proche, de Jean Raspail, auteur prolifique, ouvert à bien des domaines d'inspiration, qui passe pourtant, au regard de la majorité des gens, pour n'être que « l'auteur du Camp des Saints ». Soit dit en passant, Déon et Raspail, de la même génération ( Raspail étant le « cadet » de 6 ans de Déon), amis, voire « complices » - gardons les bons souvenirs, telle cette émission pétillante d'esprit faite tous deux à Saint-Malo au salon des « Etonnants voyageurs »...au temps où cette manifestation littéraire et maritime n'était pas encore fermée aux « incorrects »- ont publié leurs romans-choc, qui leur collèrent ensuite à la peau, à à peine 3 ans de distance !

 

Dans l'esprit de cette chronique de souvenirs personnels, ces « Poneys sauvages » marquent un tournant. Des barrages politiques ont privé Michel Déon de la récompense littéraire suprême, mais ils ne pourront pas l'empêcher d'obtenir un « accessit » de choix sous la forme du « Prix Interallié ». La remise de ce Prix prestigieux donne alors lieu à un grand dîner-débat aux « Intellectuels Indépendants », au Palais de Chaillot, sous la présidence du dynamique Jean-François Chiappe. C'est pour le jeudi 4 février 1971. M. et moi y assistons, et comme, suite au « Balcon de Spetsai », renforcé par « Les poneys sauvages », nous avons déjà l'intention de nous rendre en Grèce au printemps, et y faire une halte de quelques jours dans cette île inconnue, nous arrivons avec nos livres, en vue d'une dédicace. La soirée va tenir ses promesses. L'ambiance est chaleureuse, voire euphorique. Il faut patienter dans une longue file d'attente, et puis vient notre tour. Un peu intimidé quand même, après lui a voir présenté les « Poneys », objet officiel de la soirée,et avoir obtenu une dédicace sans doute cent fois répétée j'exhibe soudain le « Balcon » en révélant d'un trait notre objectif : venir le voir chez lui, à Spetsai ! Alors, tout va très vite : Michel Déon lève son regard vers moi, puis vrille un œil perçant en direction de M. Et, se penchant sur la page de garde de notre livre, il écrit : « Pour Monsieur et Madame Pierre Dimech, cet itinéraire qu'ils vont bientôt suivre », signe et date. Tout en le remerciant, je découvre la dédicace, et le sang me monte à la tête : Déon vient d'entériner notre future visite ! En sortant du Palais de Chaillot, dans cette nuit d'hiver parisien qui soudain se fait douce, je cherche instinctivement la statue d'Athena.

 

Le 26 Mai, ce sera chose faite. Après le long prologue routier de Paris-Nice, où sont nos familles et où nous laisserons notre Isabelle chez ses grands-parents, ce sera la traversée initiatique de l'Italie, toujours par la route, l'embarquement à Brindisi, et enfin, la Grèce. La voiture sera laissée dans un garage à Athènes, avant l'embarquement pour les îles du golfe Saronique. Et enfin, Spetsai. J'ai écrit ce voyage. Je ne m'attarde donc pas.

Nous rendrons visite à Michel Déon à deux reprises, les 26 et 31 Mai. Nous parlerons de mille choses, avec l'Algérie en toile de fond. A travers « les Poneys sauvages », mais aussi « LA CAROTTE ET LE BÂTON » .

Et à travers ma propre expérience de Pied-Noir.. Je parlerai d'ailleurs de Jean Brune à Déon, qui l'a connu au moins dans le cadre des premiers numéros de « L'Esprit public ».

 

Richesse exceptionnelle de cette année 1971, je serai amené à parler à son tour de Michel Déon à Jean Brune, lors d'un dîner à la maison, dans notre perchoir au-dessus des Buttes-Chaumont, le samedi 18 septembre. En présence du Docteur Jean-Claude Pérez. Sans savoir que c'était la dernière fois que je voyais Jean Brune…

 

Quant à Michel Déon, une fois adressé mon récit de ce Voyage en Grèce de Mai 1971, j'échangerai avec lui quelques correspondances, en tournant cette fois mes regards vers l'Irlande, où le projet d'une nouvelle visite avait reçu son accord. Je lui avais aussi parlé de Malte, de ma découverte, de mes travaux, et finalement constatant avec lui qu'on en revenait toujours aux îles !!! Entre temps était venu le temps du « TAXI MAUVE » et des aventures du « JEUNE HOMME VERT » J'avais quand même un peu la nostalgie de la Lumière grecque...C'est peut-être cela qui me fit traîner dans la préparation effective d'un voyage en Irlande, dans le Comté de Galway… Je regrette maintenant, et trop tard, ce non-aboutissement. Surtout que nous allions partager, Déon et moi, cet invraisemblable « honneur » d'être des « vice-consuls » de Patagonie, sous la houlette de Jean Raspail !!! Mais, à l'époque, cet état n'était même pas dans notre imagination !…

 

Il reste que j'ai revu Michel Déon une dernière fois. Et ce fut à Paris. Lors de son élection à l' Académie Française,en 1978, il fut, comme il est de coutume, organisé une souscription pour l'acquisition de son épée d'Académicien. Et nous y participâmes. Le grand jour venu, une brillante réception réunit les souscripteurs, et l 'épée du nouvel « Immortel » nous fut présentée.

Michel Déon, avec une grande gentillesse, et une infinie courtoisie, eut un mot pour chacun. Il nous reconnut, et ce ne fut pas un pieux mensonge. En effet, nous parlâmes de nos enfants – lui, avait un garçon et une fille – et nous, une fille unique. On eut le temps de montrer des photos, et, très galant, Michel Déon nous déclara : « Plus tard, nous marierons notre Alexandre avec votre Isabelle... »

 

Est-il présomptueux, voire insensé, de penser que dans cette brillante assistance, nous avons sans doute été les seuls à recevoir de l'illustre écrivain et nouvel académicien, au nom de son fils, une « demande en mariage » anticipée pour notre fille, alors âgée….de 10 ans ? Demande qui, en l'occurrence, cadrerait tout à fait avec le feu d'artifices de l'imaginaire, véritable « Jeu du Roi » de l'univers patagon !!!

 

C'est ainsi que s'achève, comme un Conte de fées qui se serait perdu dans les nuages, l'évocation de mes souvenirs personnels mettant en scène Michel Déon.

 

Que l'Eternité lui soit douce !…..

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27 février 2017 1 27 /02 /février /2017 10:10
Couverture du livre décrit précédemment.

Couverture du livre décrit précédemment.

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23 février 2017 4 23 /02 /février /2017 18:41

 

La dernière phrase du texte sur les " Verticaux " est restée en rade ' caprice technique ? ), ainsi que les références de l'ouvrage :

Le vent qui souffle sur ces « Verticaux » décoiffe les « bien-pensants ».Il porte la marque d'un pessimisme joyeux, qui renvoie à bien de nos maîtres à penser. Et il est le Signe prometteur d'une relève.

 

Le livre de Romaric Sangars : " LES VERTICAUX " 226 p. Paris, 2016

est édité aux " Editions Léo Scheer "

A noter  que premier roman n'est pas la première publication de l'auteur, qui, en 2015, avait signé, disons un pamphlet littéraire intitulé :

" Suffirait-il d'aller gifler Jean d'Ormesson pour arranger un peu la gueule de la littérature française ? ", paru chez Pierre-Guillaume de Roux.

J' ai fait allusion à Cyrano dans le corps de mon texte. Ce qui m'amène à me demander si le jeune Romaric a dédicacé son ouvrage à Jean d'Ormesson, et dans l'affirmative, s'il lui a marqué :

" A la fin de l'envoi, je touche !!! " 

 

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23 février 2017 4 23 /02 /février /2017 17:39

« Nous sommes quelques-uns. Nombreux, peut-être...Qui l'estimera ?...Nous sommes quelques-uns que couvre une grande ombre » .

 

Lorsque j'ai ouvert ce premier roman d'un auteur dont je venais de découvrir l'existence en suivant une émission de « TVLibertés », et avant-même d'aller puiser quelques repères sur la quatrième de couverture, je sautai directement à la dernière page de ce livre ,dont le titre était déjà, plus qu'un résumé-programme, un « signe de piste » invitant à je ne sais quel « chemin noir » cher à Sylvain Tesson. En effet, lorsque je mets la clé de contact en abordant une nouvelle œuvre littéraire, je m'assure tout d'abord, avant d'en prendre la route, de ses premières et dernières lignes, et même, de façon encore plus serrée, de ses premiers et derniers mots. La compréhension de la fin nécessitera une citation plus longue, que ce début qui frappe comme un éclair.

 

« Mon dépouillement, mon isolement, voilà qui constituait des circonstances idéales pour vider des cartouches d'encre, et tenter, dans la masse et l'obscurité, de parvenir, sans viser aucun être, à en toucher quelques-uns…. Il fallait que je paye ma dette...Parce qu'Emmanuel Starck avait vécu brandi dans l'axe d'une certaine transcendance, parce que Lia Silowsky m'était apparue toute criblée de rayons, au sein de l'ère plongeante qui est la nôtre, plongeante et si submergée de ténèbres, si oublieuse et si tardive, j'avais aimé ces deux êtres comme les dernières allusions au soleil ».

 

La quatrième de couverture fera son office d'approche de l'histoire. Je ne vous la raconterai pas. Mais, chemin noir pour chemin noir, je vous dirai que dans cette approche, au dos du livre, on trouve épars des mots tels que : désabusé, fièvre, inspirée, mysticisme, visions, aventurier, arts martiaux, traditions d'une chevalerie, sabotages….

 

Et au moment où Michel Déon tire sa révérence, dans l'élégante discrétion que fut sa longue et riche vie ( j'en reparlerai bientôt, à base de souvenirs personnels ), se lève un tout jeune « quadra » - 40 ans cette année -nommé Romaric Sangars, dont la photo, en couverture, me fait penser à Jean-Pax Méfret, au même âge...et il y a près de 40 ans. Je me dis que quand s'efface dans le limon de la terre un hussard ayant rempli son contrat, surgit d'une nouvelle vague un hussard qui regarde du côté du soleil. Je n'entrerai pas dan le débat subtil des critiques littéraires sur le vocable « hussard ». C'est ma vision personnelle. Qui recouvre les différents profils de ceux qui, au-delà de cette image guerrière assumée, sont tous les Enfants de Cyrano, portant leur panache en bandoulière.

 

Mais attention, cet ouvrage qui sait mêler les contraires – et qui est donc profondément « humain », en jetant aux orties la défroque larmoyante de l'humanitarisme professionnel – débouche à maintes reprises de ses noirs cheminements pour monter à l'assaut de tout ce qui est aujourd'hui labellisé « correct » ! Dans ce parcours de onze mois, qui va d'un « décembre » à un « novembre » non millésimés, on se trouve propulsé dans plusieurs tranches d'époque, de notre époque...J'y ai retrouvé, au début, une atmosphère qui m'a rappelé le film « Les tricheurs », que j'avais vu à Alger en 1959, et à la fin, on se trouve plongés dans un vent de panique et de barbarie qui, vaguement mentionnés comme s'étant produit à l'orée du siècle actuel, font manifestement référence à cette terrible année 2015 à Paris (tout se passe à Paris , dans ce livre ).

 

Pour pénétrer plus intimement dans le coeur de ces « Verticaux » , voici quelque citations, prises au hasard, qui ne sont pas des « pépites » - nous ne sommes pas chez les Banquiers - mais de belles et bonnes munitions, de tous calibres.

 

« Cet élan portait le nom d'héroïsme...Il se lisait surtout dans le génie de certains artistes qui avaient su faire fuser des beautés neuves;L'action ou la création, il ne s'agissait, en fin de compte, que de domaines distincts où se déployait néanmoins le même phénomène. Enfin, à un degré ultime, le vieil idéal de la sainteté...représentait peut-être cet élan orienté dans le sens d'une transcendance totale ».

 

« Au fond, l'héroïsme est une ivresse...mais une ivresse souveraine, un don soudain de soi ».

 

« Nous serons verticaux à leur en foutre le vertige ».

 

« Un relativisme absolu n'est que l'autre nom de la lâcheté ».

 

« Nous souriions dans l'ombre.

Nous.

Nostalgiques des magies mortes ».

 

« Nous n'avons aucune utopie à offrir. Seulement une manière exaltante d'envisager le tragique de vivre ».

 

« Il se trouvait que l'honneur témoignait également d'un certain rapport aux morts….Les morts étaient des vivants dont les phrases avaient été brisées ».

 

« L'époque nous imposait l'absurdité de la pulsion immédiate, le bégaiement d'un perpétuel présent, l'interchangeabilité relativiste, la réduction au nombre stérile

 

« La chevalerie comme l'ordre samouraï, en tant qu'institutions, avaient toutes deux procédé d'une spiritualisation de la force ».

 

« Face à ce qui prétendait tout mêler, diluer, affadir, nous avions répliqué ».

 

« Ce n'est pas par l'adversité, qui si souvent se révèle précisément un moyen de se construire,que le déclin survient. C'est par la parodie ».

« Tout ce qui était vraiment vivant paraissait trop fort pour ce temps ; tout ce qui était élevé en menaçait l'équilibre inférieur ; rien ne perdurait plus que dans la boue ».

 

Il y a beaucoup à méditer sur ces pensées. Il en est d'autres, de plus vives encore, reflet de l'action dévastatrice qui monte en puissance vers la fin de l'ouvrage. Je ne peux en parler sans déflorer le sujet.

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25 janvier 2017 3 25 /01 /janvier /2017 20:31

RAPPEL SUCCINT :

D'un écheveau de tendances diverses, exactement à l'image des hésitations des gouvernants français et de leur administration locale sur l'orientation d'une véritable politique algérienne, d'expériences, d'échecs, d'avancées, et de confrontation permanente entre un système imposé depuis Paris et une situation concrète sur place en constante évolution humaine, il faut dégager quelques notations de base, qui, sans pouvoir rendre compte de tout, n'en constituent pas moins une réalité sur laquelle on peut s'appuyer :

- Les préoccupations relatives à l'Enseignement ont vu le jour très tôt après la prise d'Alger, on peut dire:  en avance sur la pacification de tout le territoire et sur la fixation d'une ligne politique affichée, même provisoire.

- La place de la population locale a de suite été envisagée. le facteur déclenchant a été la médecine, même rudimentaire, dont les bienfaits ont eu vocation à être portés à toute la population du territoire, associant très rapidement l'exigence de compréhension, donc d'apprentissage des langues parlées dans le pays à la possibilité de soigner. Ce socle linguistique entraîna l'extension d'une formation de base médicale aux autochtones. Parallèlement, le besoin se fit rapidement sentir , non seulement de comprendre les gens, mais aussi, d'apprendre à connaître leurs us et coutumes. Cette nouvelle branche de communication généra elle-même l'organisation des connaissances dans un domaine qu'on qualifiera pour simplifier de "juridique", le tout, en tâtonnant quant à l'articulation de tout cela, et en rencontrant maints obstacles.

- Lorsque ces différents types d'enseignements prirent forme, notamment dans le secteur juridique, et se firent ambitieux, cela vers le milieu du XIX° siècle , on vit deux grandes tendances émerger et s'affronter, non exemptes d'influences politiques nées de l'évolution de la situation en France, avec le Second Empire ( avant, pendant et après): les partisans d'un Enseignement, certes de base française, mais  adapté aux conditions locales, sociologiques et autres, face aux tenants d'une assimilation totale de l'Enseignement Supérieur en Algérie à celui de la France métropolitaine. Dans un contexte humain déjà complexe, en raison de la diversité des communautés et de leurs caractéristiques propres, souvent irréductibles les unes aux autres, avec un " chapeau" français métropolitain, lui-même orienté vers des enjeux auxquels l'Algérie était intrinsèquement étrangère, ces débats passionnés s'enfonçaient dans la confusion, et rendaient indispensable une intervention d'ordre législatif.
Ce fut là le rôle de la Loi du 20 décembre 1879. 

Cette loi ne comportait que  9 articles ! On est loin des textes d'aujourd'hui, hypertrophiés et souvent rédigés à partir de bases autres que celle donnée au XVII° siècle : " Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement...;"

Trois de ces 9 articles portent statut des Ecoles de Droit, des Sciences, des Lettres, et de Médecine et Pharmacie.

Tirons-en les dispositions qui intéressent notre recherche :

L'enseignement dans l'école de droit comprend les matières exigées pour l'obtention du baccalauréat, plus le droit commercial, le droit administratif et les coutumes indigènes.

L'enseignement dans l'école des sciences les maths, la physique; sciences naturelle, avec application à l'industrie, l'agriculture, à la statistique,  et aux besoins spéciaux de l'Algérie.

L'enseignement dans l'école des lettres comprend la littérature française, les littératures des nations méditerranéennes, les littératures classiques, la langue arabe et les dialectes algériens, et bien entendu, l'histoire - particulièrement celle de la France et de l'Algérie, la géographie, l'archéologie...

Ces Ecoles se doublent d'écoles préparatoires de médecine et de pharmacie, et de droit. On y délivre des certificats  qui comportent des branches spéciales, par exemple: en coutumes indigènes, assorties au droit administratif.  Sciences et lettres ont aussi leurs Ecoles préparatoires, délivrant des brevets spéciaux, adaptés à la spécificité algérienne

Ces Ecoles préparatoires, portées sur les données pratiques plus que sur l'enseignement théorique,sont destinées à répondre " aux conditions particulières du sol, du climat, de la religion, du langage et de la société ".

(in Rapport du Sénateur de Rozière ) "  C'est une création d'un nouveau genre  qui offre plus de souplesse et d'élasticité, qui n'est limitée par aucune tradition ".

C'est un très grand pas qui est accompli vers une Algérie moderne, animée par le Réalisme et le dynamisme créatif. Il y a là la marque de l'ESPRIT PIONNIER.

Dans cet esprit, en conclusion, ce sont des pistes qui vont être ouvertes, pour que s'y engouffre toute personne avide de creuser la question. Voici donc quelques repères bibliographiques  :

- Jacques-Numa LAMBERT : " Manuel de législation algérienne " ( Alger, 1952)

- Louis-Auguste BARRIERE : " Le statut personnel des musulmans d'Algérie de 1854 à 1962 " ( Thèse, Dijon, 1993 )

- Jean-Christian SERNA : " Citoyenneté et laïcité dans l'autre France ( Algérie 1830-1962) dans Mélanges en l'honneur de Camille Jauffret-Spinozi.

-Florence RENUCCI : " Le statut personnel des indigènes - comparaison entre politiques juridiques française et italienne en Algérie et Libye, 1919-1943. (Thèse d'histoire du droit, Aix 2005) 

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23 janvier 2017 1 23 /01 /janvier /2017 18:37

Profitant d'un retour de connexion, et donc simplement pour vous dire, amis lecteurs, que je suis toujours là, je vous livre une recension très chaleureuse de mes " BAL(L)ADES MALTAISES " parue sous la signature Ô combien avisée d'une personne qui a une particulière connaissance de l'âme maltaise. Cette recension figure dans le numéro de la "Revue algérianiste"  de décembre 2016.

 Pour les personnes qui seraient intéressées, 2 possibilités s'offrent : qoit commander l'ouvrage chez l'éditeur : Atelier Fol' fer, 147 rue Bel Air, 28260 La Chaussée d'Ivry; tél : 06.74.68.24.40, 22€ + frais d'envoi; soit, pour celles qui sont dans ma région et ont l'occasion de me rencontrer dans le cadre du cercle d'Aix, en me contactant, par mail ou téléphone.

J'espère pouvoir reprendre le cours normal de maltalger dans un délai raisonnable, SFR m'ayant promis un changement de box...Je rappelle qu'il y a l'étude portant sur la faculté de droit d'Alger à terminer, et d'autres sujets à évoquer....Mais, bon , n'anticipons pas trop !!! de peur que " ça porte malheur", comme disait ma grand-mère. 

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12 janvier 2017 4 12 /01 /janvier /2017 18:11

                                           AVERTISSEMENT :

A toutes celles et ceux qui vont habituellement sur MALTALGER et qui sont comme moi sur SFR ( Hélas!!!...), je signale que cet organisme s'est cru autorisé - et s'en vante - à s'immiscer dans le fonctionnement de nos boites-mail, dans les termes suivants : " Finie la boite de réception polluée! Nous avons déplacé toutes vos newsletters dans le dossier "info-Pub"....Ainsi, vous ne pourrez plus manquer les mails importants ".

Deux observations: SFR s'arroge le droit de décider, dans ce qui arrive dans notre boite mails, ce qui la "pollue" et ce qui ne la pollue pas.

Et SFR décide de "trier" nos mails, selon leur degré d'importance.

Et ce groupe joint le geste à la parole ! j'ai trouvé leur système déjà mis en place. Et je suis allé dans 'l'enfer des mails", le fameux dossier "info-pub". J'y ai certes trouvé des mails de pure pub, donc, passons, mais j'y ai aussi trouvé comme par hasard des mails provenant de journaux, de périodiques, de chaînes de télé émettant sur internet, auxquels je suis abonné !!!

Et, le sommet : j'y ai trouvé...MALTALGER ! Voilà donc les mises à jour de mon propre Blog estimées " polluantes " par SFR, et écartées de ma boite de réception, pour être rejetées dans les ténèbres extérieures.... Un comble !!!!

Dépassant ainsi les bornes de l'arrogance, qui lui font dire : Je pense pour vous, SFR  en fait PENSE A NOTRE PLACE, écartant ce qui ne lui plaît pas et imposant ce qui lui plaît, comme c'est fait déjà avec "SFR-PRESSE", introduit dans mon smartphone sans que je l'aie demandé, et que je n'arrive pas à supprimer....

 

Alors, de grâce, abonnés à SFR, vérifiez bien que maltalger ne se trouve pas chez vous dans cette boite de pub, voire dans les indésirables..Et si oui, réintégrez-le dans votre boite de réception. Merci !

 

Je vous souhaite donc une Bonne Année 2017, qui soit en même temps une année VIGOUREUSE. Nous sommes des PERSONNES, et non des individus en mutation vers l'état de ZOMBIES....

 

A très bientôt .....

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17 décembre 2016 6 17 /12 /décembre /2016 08:42

L' Université d'Alger - et dans ses composantes, la Faculté de droit - voit donc officiellement le jour en 1909.  Il sera bon ici de rappeler qu'en cette 1ère décennie du XX° siècle, l'Algérie française " PREND FORME " sous différents aspects culturels: la Littérature vient de voir éclore le fameux " Sang des races" de Louis Bertrand,roman-culte et véritable étude sociologique,  et voit être publiés les premiers romans du "cycle algérien" de Robert Randau ( "Les Colons", "Les Algérianistes" ); les Arts plastiques  - Peinture et Sculpture - se dégagent de l'Orientalisme avec la création de la Villa Abd-el-Tif en tant que lieu d'activités artistiques inspirées de la célèbre Villa Médicis de Rome. Sur le plan musical, l'Opéra est sorti, notamment à Alger et Oran, des petits programmes, pour se mettre au diapason des Grandes Scènes de France...Il y a donc un véritable bouillonnement culturel sur le territoire de cette " autre France ", qui est justement à la fois " France "' et " Autre"... N'oublions donc pas ce contexte, même en prenant le chemin de cette Université toute neuve qui dresse son fronton néo-classique en haut des jardins qui s'élèvent en gradins exotiques au-dessus de la rue Michelet, se découpant dans le bleu profond du ciel comme une Acropole.. 

Mais ceci ne s'est pas opéré par un coup de baguette magique. Et s'il y a eu "naissance", cet événement fut bien plus le produit d'une consécration administrative qu'une création absolue. Et cette naissance a été précédée d'une longue gestation, souvent difficile et parfois douloureuse. Elle a tout d'abord été liée aux contre-coups et autres atermoiements marquant les incertitudes quant au sort de l'Algérie. Elle a eu à faire face aux difficultés inhérentes au pays, ainsi qu'au scepticisme ambiant, de part et d'autre de la Méditerranée. Elle s'est heurtée aux problèmes budgétaires, elle a été écartelée entre les tenants d'un Jacobinisme absolu et ceux  qui voulaient mettre l'accent sur la seule spécificité algérienne.Elle a eu  enfin et surtout à surmonter les problèmes humains, dans sa tentative généreuse, qui s'est de suite fait jour, de réunir et former des populations d'origines très diverses, aux modes de vie différents, pour ne pas dire: antagonistes.  

Et pourtant, l'idée, lancée sur le terrain, fit son chemin, cahin-caha. Parce qu'elle avait pris d'emblée racine dans le Réel. Les tâtonnements purent faire grincer des dents, les fausses routes, faire sourire les donneurs-de-leçons. L'Enseignement supérieur en Algérie fut cet embryon  qui s'accrocha à la vie. Coûte que coûte.Et qui parvint à terme. 

Le but de ces articles se limitant, comme déjà indiqué, à "l'ouverture de pistes", il ne sera pas question d'entrer dans les détails d'une aventure à rebondissements multiples, d'autant plus qu'il faudrait , surtout pour les premières décennies, déborder hors du cadre des études juridiques, l'enseignement supérieur dans l'Algérie des débuts jusqu"à l'institution officielle d' ECOLES distinctes ( Droit, Médecine, etc...) préfigurant les Facultés futures, traitant de façon groupée toutes les disciplines, dont la première à émerger fut la Médecine.

C'est par la Médecine - à l'indéniable priorité humanitaire en même temps qu'humaniste, que tout commença.  L'ouvrage célébrant le cinquantième anniversaire de l' Université mentionne dans son introduction  que " dès l'origine, l'Enseignement Supérieur algérien prit un caractère régionaliste et utilitaire qui allait se perpétuer à travers toutes les vicissitudes de l'Histoire algérienne";

Et c'est pour les besoins de la médecine que se dispensa d'emblée l'enseignement de la langue arabe, officialisé dès le 17 janvier 1837 dans le cadre d'un cours élémentaire, destiné d'une part à mieux connaître les populations locales, d'autre part, à se faire connaître d'elles. ( déclaration de l'orientaliste Bresnier, lors de l'inauguration de ce cours ).

Ce cours sera institué dès 1846 à  Constantine, puis Oran.

En 1848, l'Algérie fut érigée en Académie ( Arrêté du 7 septembre ), alors même que le nombre d'Académies de la métropole était ramené  de 27 à 19.

En 1850, les Médersas de Constantine, d'Alger et de Tlemcen, furent réorganisées dans le but d'ouvrir des écoles de droit supérieur musulman destinées à la formation de candidats aux emplois du culte, de la justice et de l'instruction publique.

Le début des années 70 vit s'amplifier les débat et controverses sur le fonctionnement de l'Enseignement supérieur en Algérie. Un Jules Duvaux, député de Nancy et futur ministre de l'instruction publique, voulait une assimilation totale de cet enseignement  à celui de la métropole. S' y opposa Paul Bert, qui voulait instituer en Algérie un enseignement supérieur laissant une large place à l'histoire algérienne, à l'archéologie algérienne, et aux langues et dialectes parlés en Algérie.Cela dans une future Faculté des Lettres. Quant au Droit, il voulait instituer de chaires nouvelles sur les coutumes algériennes " tenant compte de la situation complexe d'un pays où se trouvent en permanence des races et des nationalités diverses. Et tout cela, sans toucher aux chaires fondamentales qui constituent l'essence même de la Faculté, c'est-à-dire les chaires de licence et de doctorat".

 

Tout cela aboutit à un texte qui allait faire date, puisque mettant en place un système qui  déboucherait plus tard sur la création de l'  Université d'Alger. Il s'agit de la Loi du 20 décembre 1879. 

 

Pour ne pas alourdir ces développements, cette loi fera l'objet d'une prochaine mise à jour.

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11 décembre 2016 7 11 /12 /décembre /2016 15:54

LE PERSONNEL ENSEIGNANT :

En suivant un ordre hiérarchique, on trouve au sommet

1 - les Titulaires d'une Chaire, qui sont les seuls  à porter le titre de  PROFESSEUR au sens plein du terme. Il y a eu ainsi, entre 1909 et 1959 , 25 Chaires, dont 5 consacrées spécialement aux disciplines intéressant l'Afrique du Nord. Leur énumération complète dépasserait le stade de ce blog. On se contentera de dire qu'elles étaient, en ce qui concerne les disciplines " générales", regroupées en "sections" : 

- Section Historique

- Section Droit Privé

- Section Droit Public

- Section Economique

 

Les Chaires spécialisées dans les disciplines intéressant l'AFN étaient :

- Législation algérienne ( depuis 1910 )

- Droit musulman ( depuis 1910 )

- Droit et Sciences coloniales ( depuis 1942 )  devenue, par arrêté du 7 avril 1959 : Droit et Economie d'Outre-Mer .

- Sociologie nord-africaine ( depuis 1945 )

- Economie algérienne ( depuis 1953 )  devenue, par arrêté  du 7 avril 1959 !: Economie algérienne et saharienne .

 

2 - les Agrégés .  Ils ont les mêmes diplômes que les titulaires de chaires, mais ne sont pas ( pas encore ) titulaires d'une chaire à eux attachée .

 

3 - les Chargés de Cours.  Ils n'ont pas encore passé (ou passé avec succès) le concours d'agrégation. Mais ils sont déjà docteurs en droit.

 

4 - les Assistants. C'est là la première marche du " cursus" professoral, le statut initial de ceux qui se destinent (en principe ) à l'agrégation.  En général, à Alger, à cette époque, ils sont au stade du doctorat, en préparation de thèse.

j'ajouterai, pour la petite histoire, qu'en raison de l'importance exponentielle prise par les travaux pratiques, suite à la réforme de la Licence en droit entrée en vigueur au début de l'année universitaire 55-56, la création d'une nouvelle fonction, au début de l'année 1960: celle de "Moniteur de Travaux Pratiques". je fus de ceux-là jusqu'à la fin de l'année, qui me vit partir au service militaire.

 

Une donnée chiffrée, pour fixer les idées : 

- Pour l'année universitaire 1909-1910, la 1ère donc de la toute nouvelle Faculté de Droit : 13 enseignants, dont 8 professeurs, 2 agrégés, 3 chargés de cours.

- Au 1er avril 1959 : 39 enseignants, 14 professeurs, 10 agrégés, 6 chargés de cours, 9 assistants.

On le voit, la Faculté de Droit d'Alger, devenue, par décret du 26 août 1957, " Faculté de droit et des sciences économiques ", a vu son personnel enseignant global, tripler en nombre.

Il est vrai que dans les années qui ont précédé le "cinquantenaire", la Faculté, et donc ses enseignants, s'est vue adjoindre  2 "annexes": l'Institut d'études politiques, et l' Institut de préparation aux affaires", créés respectivement en 1949 et 1957.

Parallèlement, avaient été mis en place par la faculté de droit d'Alger, dès 1954, officialisés ensuite par arrêté ministériel du 14 septembre 1956, les Instituts d'études juridiques d' Oran et de Constantine, accueillant les étudiants préparant soit la Capacité en droit, soit le baccalauréat en droit ( correspondant aux 2 premières années des 4 ans de licence).

Une prochaine mise à jours évoquera la période antérieure à la création officielle de la faculté de droit d'Alger,  notamment la place qui était envisagée pour l'étude des "spécificités algériennes ",et fournira quelques données bibliographiques sur cette question, basées sur les études des situations concrètes, et non sur les  a-priori démagogiques.

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10 décembre 2016 6 10 /12 /décembre /2016 17:29
UN REGARD SUR L'UNIVERSITE D'ALGER

Mon but  est de fournir quelques éléments sur le travail effectué par la Faculté de Droit d'Alger en tant qu' université française, sur les matières relevant du droit et des coutumes musulmanes d'Algérie. Cette recherche a été déclenchée en vue d'ouvrir des pistes à des personnes amies qui m'ont interrogé à ce sujet.

Deux mots d'abord sur ma source,et sur les souvenirs qu'elle fait resurgir:

En fin 1959, l'Académie d'Alger a fêté le cinquantenaire de l'Université de notre ville. Je me trouvais alors à Paris pour des recherches dans le cadre d'un 1er projet de thèse de doctorat en droit qui, compte tenu du sujet qui m'avait été suggéré par mon patron de thèse, m'avaient curieusement fait travailler en Sorbonne et non à la Fac de droit ( il s'agissait d'un sujet portant sur l'influence croisée des Jésuites et des Oratoriens, Ordres concurrents en matière d'Enseignement, sur les futures générations révolutionnaires...Thème de science politique plus que de "droit", mais il est vrai que cette matière, enseignée dans un Institut spécifique mais lié à la Fac de droit, venait d'être inscrite au programme des D.E.S.  - diplômes  d'études supérieures de droit, au  niveau du doctorat. Cela témoigne du dynamisme de notre université. A mon grand regret, je n'avais donc pas pu être sur place pour les cérémonies. Regret d'autant plus profond qu'entrée en Fac en novembre 54, et y ayant passé l'essentiel de ma vie depuis ces 5 années à la fois si agitées et si fascinantes, j'envisageais alors une carrière universitaire, via le concours de l'agrégation, que je n'imaginais même pas se dérouler ailleurs qu'à Alger... Cette Fac de droit était devenue mon "lieu géométrique", ma "maison" et ma raison d'être. Quelles qu'aient été les compensations ultérieures, je peux dire, près de 60 ans après, que je ne me suis jamais remis de ce destin manqué. 

Mais, ce "retour sur image" effectué, revenons à notre sujet.

Ce cinquantième anniversaire de l' Université d'Alger a fait l'objet d'un beau volume de 258 pages regorgeant d'illustrations, de schémas, et fourmillant de listes de noms. C'est aujourd'hui une source incontournable de toute documentation précise sur l'histoire, l'organisation et les oeuvres de l'Université d'Alger. Je m'y suis plongé dès cette époque, l'ayant acquis dès mon retour de Paris, en me focalisant bien sûr sur la faculté de Droit. Pourtant je dois reconnaître avoir alors quelque peu lu seulement "en diagonale"(mais l'actualité de l'époque nous dévorait, dans ces lieux d'études, devenus un "Camp retranché"...) une copieuse introduction - de 38 pages -  coincée il est vrai entre les listes des officiels et le corps des descriptifs. Or, elle méritait- et mérite plus que jamais - qu'on l'étudie avec le plus grand soin.  Ce sont en effet, comme son titre l'indique, des "pages d'Histoire". 

Je la découvre aujourd'hui.  "Il n'est  jamais trop tard", n'est-ce pas ?

Ces 38 pages, qu'on aurait pu croire de pure convenance, au-delà même du seul Enseignement, constituent une plongée dans la gestation  chaotique de l'Algérie française, mesurée à l'aune, non de la démagogie, mais du réel, du concret, du quotidien.

Apparaissent ainsi de s^rojets ambitieux mais contrecarrés par des obstacles divers trouvant leur point commun dans la déconsidération assez répandue en France à l'égard du territoire algérien et de ses populations, européens compris, dans ce qu'il faut bien appeler la caractéristique ambivalente de cette Algérie, qui était à la fois un pays "exotique" souvent rebutant et toujours déconcertant, et une "Nouvelle France","juste en face", de l'autre côté de l'horizon méditerranéen.

Il y avait là, dressé sur la voie étroite des bonnes intentions, un Signe de contradiction.

Pourtant, le réel, lui, slalomant entre les obstacles, les ignorant même quand il le fallait, cheminait quotidiennement. Cette Université, qui fêtait ses 50 ans en 1959 comme un défi lancé à un futur épique, ne pouvait oublier qu'elle était née de "balbutiements" qui avaient constitué sa matrice dès les années 70 du siècle précédent, et que pour cela, elle ne s'était pas créée "ex-nihilo". Ce vocable de "cinquantenaire" , raccourci commode pour frapper les esprits, a été en fin de compte un peu "réducteur". C'est bien 30 a,ns qu'il faudrait y ajouter, ne serait-e qu'à titre de gestation, et c'est tout l'intérêt de cette introduction historique à l'ouvrage officiel issu de cette célébration. Après bien  des errements, c'est une Loi du 20 décembre 1879 qui a créé des "Ecoles" d'enseignement supérieur, dont, 30 ans après,  a découlé ensuite l'Université d'Alger.

Et c'est finalement sur une période de 80 ans qu'il faudra se pencher pour entrevoir la mission qui a été accomplie jusqu'à ce cinquantenaire.

Pour en avoir déjà une idée concrète, il est  bon, je pense, de publier ici, à titre d'information sur le renom national et international de l'Université d'Alger, la liste de ses " Docteurs Honoris Causa ". Elle est éloquente.

 

Pour la clarté de l'exposé, une très prochaine mise à jour publiera la listes des enseignants, la liste des enseignements traitant de la spécificité algérienne, ainsi que des indications bibliographiques sur des travaux universitaires sur le statut juridique personnel  des musulmans en Algérie.  

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