PHASE 1 : JUSQU’ EN JUILLET 2001
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La Country n’est pas perçue de façon autonome :
Elle est Partie intégrante du WESTERN
L’Amérique qui nourrit mon imaginaire est celle des Bandes dessinées, dans mon tout jeune âge, (« Kansas Kid », etc) celle aussi du « Dernier des Mohicans », livre qui m’a « marqué », puis des Films de John Wayne, Gary Cooper, Richard Widmark, etc, etc… Musique et danse sont celles qui font partie des films, même en disque. Et K7 audio. Et je reste marqué par « Dans les plaines du Far-West quand vient la nuit, les Cow-Boys autour du biv’ouac sont réunis » de mes 10 ans, chantés par Yves Montand , ainsi que par « quand allons-nous nous marier…mon cow-boy adoré » dans lequel on parlait d’un « tueur du Texas », de la même époque.
Exemple le plus spectaculaire : mon voyage de JUIN 1984 . Ce que je tiens à découvrir en priorité absolue à partir de LOS ANGELES, notre point de destination, c’est l’ARIZONA légendaire : TOMBSTONE ( hélas, pour un très court instant), et TUCSON, où je mise tout sur OLD TUCSON, le monde de RIO BRAVO. De même, pour la découverte de MONUMENT VALLEY.
En route, sur la radio de bord, je capte de la Country music – avec délice – je me souviens de « Yellow Roses of Texas »…Mais pour moi, ça fait partie de l’univers mythique de l’Ouest. Et, lorsque revenu à Versailles, je sonorise la 2ème bande de mes films, je mets de la musique de westerns…la seule que j’ai en disque.
Au cours du voyage, j’ai pourtant acquis un chapeau – en paille – « cow-boy », à Tombstone, et un ceinturon avec boucle – représentant un chariot de pionniers – au Grand Canyon du Colorado. + une chemisette à carreaux à Los Angelès. C’est bien sûr « Country », mais je ne le sais pas. D’ailleurs, je ne me pose pas la question. C’est « Western ». C’est tout. J’ai jeté une fois ( à Los Angelès) un coup d’œil de curieux aux bottes, mais que j’ai trouvées trop chères , et inutiles, n’imaginant pas un seul instant en portant en France !.
Parallèlement, je me passionne pour l’Histoire, notamment celle de la Guerre de Sécession – côté Sudistes, cela va sans dire. « Autant en emporte le Vent » est pour moi le film n°1…et j’ai évidemment lu l’immortel roman de Margaret Mitchell…
Au cours des années 80 , je vois dans le journal « PRESENT » les chroniques , souvent des pages entières, consacrées à l’Amérique par mon ami Alain, mais j’avoue donner alors la priorité aux récits historiques, aux films Western, et fort peu à ces fiches qu’il réalise sur des chanteurs et chanteuses, certes très sympathiques, mais dont les noms ne me disent rien, à part Johnny Cash, bien sûr…
A la mi - 98, Alain et Sabinecréent , sous forme de petite Revue, la « Lettre mensuelle de Country Music Attitude », association qu’ils viennent de former.
Un an après, en 1999, je m‘abonne à CMA . C’est un tournant, car je m’engage pour la première fois dans l’univers spécifique de la Country, laquelle étant, aux yeux de mes amis, une ATTITUDE, est en pleine harmonie avec ma propre conception. Mais, je ne suis que dans la première partie de ce « tournant » , étant encore trop plongé dans l’activité politique salonaise…
Plus encore, ce sont mes responsabilités de Président National du Cercle Algérianiste, en une période très difficile, assorties de ma fonction de Conférencier dans les mêmes cercles, nécessitant de nombreux déplacements, qui sont obligatoirement mes priorités. Je me consacre aussi beaucoup au monde des Paquebots…
L’obstacle majeur à un progrès décisif est l’énorme avalanche de noms nouveaux qu’il faut assimiler, (à 95% américains) dans cette Pléiade de chanteurs et chanteuses cités dans CMA, au travers de leurs concerts et de leurs CD …Il y a une lente maturation à opérer, d’autant plus lente que je reste « extérieur » aux manifestations Country la plupart loin d’ici….C’est d’ailleurs pour moi un monde inconnu, et pour cause….A commencer par tous ces vocables nouveaux : « Bluegrass, Honky Tonk, Hillbilly, Red-Necks, Grand Ole Opry, etc , etc…. ». Et je n’ai aucune idée de la façon dont se déroulent ces manifestations-Country dont parle CMA ….à commencer par les tenues qu’on y porte ! Tout cela reste encore très loin de moi….Mais, j’ai déjà des K7 audio, et quelques CD, en nombre certes limité. ET J’AIME CETTE MUSIQUE. VISCERALEMENT.
Toute l’année 2000 se passera ainsi . 2001 s’ouvre dans les mêmes conditions de surmenage. C’est alors que, vers la fin du printemps, Alain va me persuader d’aller assister au Festival de MIRANDE , à mi-juillet, nous invitant à les rejoindre tous deux sur place.
PHASE 2 : de Juillet 2001 à Avril 2002
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Entrée dans l’univers des Festivals et Début de la Country line dance
Mi-Juillet : MIRANDE
Lorsque nous débarquons dans la petite cité gersoise, que je découvre, après être passés voir notre chambre d’hôtes à 5 kms de là, c’est un double choc. Alors que la doc dont je dispose fait état d’un lieu bien défini, hors du centre, pour la tenue du Festival, nous sommes accueillis par des flots de musique country, dès les abords de la bastide, déversés par des haut-parleurs installés dans chaque rue..A cette plongée sonore s’ajoute aussitôt un choc visuel, en apercevant devant nous, se rendant tranquillement vers le centre-ville (la place d’Astarac), une famille, avec père, mère, et gamins , tous habillés « en cow-boys » !!!: chapeaux, bottes, gilets, etc…ON EN EST RESTES BOUCHE BEE !!!!
Si j’insiste sur ce qui peut paraître un détail anodin, c’est parce que, 3 ans après , je m’aperçois que ce fut un instant capital, « historique » ! Moi qui n’avais jamais fréquenté les parcs d’attraction en France, je n’imaginais pas concevable
qu’on puisse être en tenue western en pleine rue, en plein jour : c’était pour moi une tenue réservée à des sortes de bal masqué ou autre fête en milieu fermé…Or, je découvrais soudain que ce type de fête pouvait prendre une dimension véritablement publique, au vu et au su de tous, comme si l’Ouest américain, celui de notre imaginaire, venait pendre forme parmi nous….
Et c’est en tremblant d’émotion que, l’instant d’après, je faisais l’acquisition, place d’Astarac, de mon premier chapeau (à ce moment-là, je pensais d’ ailleurs que ce serait LE chapeau, l’unique…).Cadeau de ma mère pour mes 66 ans ! Allais-je revenir en enfance ? (dans une certaine mesure, bien sûr que si !)…
Bon, je ne vais pas me laisser aller à raconter par le menu ce festival de Mirande 2001 , si riche en souvenirs de toutes sortes ; mais, sur le plan de la seule Country, ce fut évidemment le baptême du feu, ou plutôt la première confrontation avec l’ensemble « concert » et « line dance ». Pour la partie concert, ce ne fut pas une surprise, mais simplement le passage à la réalité de la musique, au-delà des CD …Pour la partie line dance, par contre, ce fut à la fois une totale révélation …et un blocage absolu au niveau de toute tentative d’esquisser le moindre pas. De toutes façons, j’avais trop de choses à découvrir dans cette immense arène qu’est le lieu du festival : stands de chapeaux, de chemises, gilets, de colliers et autres bracelets indiens, boucles de ceinturons, disques, photos, badges, drapeaux, objets variés, et jusqu’à ce fabuleux « truck » Kenwood noir, farci de bottes ! Je fais le saut en fin d’après-midi, et achète une superbe paire de « texanes » assez lourdes…une fortune, mais l’ambiance, l’euphorie, les vapeurs d’Armagnac, l’exemple d’Alain et Sabine…Voilà qui dissout toute inhibition !
Nos deux amis tentent de suite de nous initier à la danse….en nous invitant à les regarder un instant puis, tout simplement à les imiter : comme si c’était si simple ! « c’est facile, nous disent-ils d’un ton encourageant, faîtes ceci, puis cela… » Ouais… Josette essaye, puis renonce rapidement : moi, je reste au bord de la piste, comme fixé au sol par des fondations. Et puis, tous ces danseurs, habillés comme pour une comédie musicale à grand spectacle, et qui font des figures savantes, et en tous cas incompréhensibles pour celui qui regarde..Non , ce n’est pas pour moi… « Il faudra prendre des cours » nous disent-ils, « allez-y, il y en a là-bas »…Mais, je préfère me plonger dans l’écoute des chanteurs et des groupes, et musarder le long des stands…C’est cela, pour moi, le fondement même de la country…
Le lendemain samedi, on passe une partie importante de la journée, toujours avec Alain et Sabine, place d’Astarac, où se déroule le « off », dans une super-ambiance bon enfant au milieu de stands ( j’y ai acquis mon chapeau et une boucle), et des brasseries, avec pas mal de bikers…Alain et Sabine vont soudain danser sur la place, entre les tables, donnant le signal à un tas de gens. Parmi eux, quelques jeunes du coin, qui tentent de les imiter plus ou moins maladroitement, en se plaçant derrière eux : c’est juste ce que nos amis nous demandaient de faire la veille, et là, j’avoue que je suis tenté, mais voilà, une chose soudain m’arrête : j’ai mon beau chapeau noir « cow-boy » tout neuf, mes bottes neuves, ma belle chemise blanche à parements noirs, également neuve : le parfait uniforme, en somme : je ne peux pas, dans mon esprit, le ridiculiser, cet uniforme, par mon inévitable maladresse , et j’ai crainte de provoquer des sourires ironiques…Ah, si j’étais en tenue anonyme d’estivant, comme ces jeunes, je me serais risqué, sans redouter des lazzi du genre : « regardez ce cow-boy à la manque, qui danse comme un ours de foire ( ou autre amabilité.) ».
Le dimanche après-midi, lorsque nous quittons Alain et Sabine, pleins de nostalgie, ils nous ont persuadés de les rejoindre le mois suivant à Saint-Agrève, aux EQUIBLUES, où là ils ont un stand. Et ils disent que c’est si merveilleux ! Ils l’ont déjà écrit dans la Revue CMA .
C’est sûr, on ira, pas pour toute la durée (on entre à petits pas dans l’univers des festivals country), mais on découvrira le monde fascinant des Rodéos…
Une anecdote significative (sur le chemin à parcourir) avant de quitter Mirande. Juste après avoir acheté mes bottes, guidé par A et S, je dis à Alain, croyant être perspicace : « ainsi, toi, avec tous ces festivals de l’été, tu es en bottes pendant l’équivalent de bien 3 semaines dans l’année ! »…Et je m’attire cette réponse lapidaire d’Alain, sur le ton de l’évidence surprise par la naïveté de ma question : « mais, c’est pratiquement pendant TOUTE L’ANNEE que je porte mes bottes !!! »….
MI AOUT : SAINT-AGREVE
Pour le public, les EQUIBLUES commencent le jeudi soir, et se terminent en fin d’après-midi du dimanche. Nous arrivons le vendredi vers 16h. Nous avons obtenu de justesse une petite chambre dans un hôtel à Desaignes, à une quinzaine de kms en contrebas de St-Agrève, sur la route de Valence. Le paysage est magnifique, et me rappelle des souvenirs d’Amérique, vers Flagstaff, l’ampleur en moins, bien sûr. Emerveillés par cette atmosphère de Ranch. La présence imposante des chevaux, ainsi que d’un troupeau de solides bovins, change du tout au tout avec Mirande. D’emblée, on sent une plus grande « authenticité » ouest-américaine. Le soir, sous le chapiteau, on se croit dans un vaste saloon ! C’EST LE CHOC. SAINT AGREVE PREND DE SUITE UNE PLACE A PART DANS MON ITINERAIRE COUNTRY…
Mais le lendemain matin samedi, plus de possibilité de tergiverser : d’ailleurs, Josette en a très envie : il y a des cours « d’initiation » à la line dance . On s’y inscrit. Remarque qui va être importante pour la suite : on est très couverts, car le matin, au départ de l’hôtel à Desaignes, il faisait 7° .En plus, j’ai mes lourdes bottes, mon grand chapeau noir en feutre rigide, etc…
La leçon dure 2 bonnes heures. La prof vient d’un club de Lyon. Elle est assez « énergique ». J’éprouve d’emblée beaucoup de mal, à ma grande surprise, car ayant le sens du rythme et l’oreille musicale, je pensais que cela me faciliterait les choses. Je fatigue assez vite, physiquement , mais aussi nerveusement. Tous ces mouvements, toutes ces figures me sont rigoureusement inconnues. On va aborder plusieurs danses à la file, et c’est de plus en plus compliqué au fur et à mesure, parce que , à la difficulté propre à chaque danse , s’ajoute la confusion avec les pas de la danse précédemment « apprise ». J’ai le sang à la tête, mais je fais de mon mieux : il faut que « j’honore mon chapeau » ! On a ainsi abordé le Cheyenne, le Tush-Push et la Texas Waltz. Mais, un incident, bref et banal, mais qui va avoir un grand retentissement sur moi, se produit pendant le Tush-Push, au moment où on fait rouler ses hanches : j’ai cru possible, pris par le rythme endiablé de la musique, de faire une figure de type « twist », en m’aidant de mes bras et en balançant d’un pied sur l’autre : repéré par la prof, j’ai eu droit à un « savon » plutôt sec, du genre : « monsieur, on n’est pas ici pour danser des mouvements à sa guise comme dans une soirée .. », le tout évidemment devant 50 personnes…J’aurais voulu disparaître sous mon chapeau…et cela m’a marqué. La danse country s’avérait difficile ; mais elle pouvait être également désagréable. CELA SE PRESENTAIT MAL …..
Le lendemain, Josette a dû beaucoup insister pour que je me réinscrive. En plus, l’atmosphère était encore plus tendue que la veille, à raison de nombreux resquilleurs, qui se mêlaient subrepticement aux stagiaires payants, en les regardant travailler , puis en s’infiltrant peu à peu dans les rangs, l’air de rien.
Après plusieurs mises en garde de la prof, sans effet réel sur les resquilleurs qui jouaient les innocents, la séance a dû être arrêtée un instant, chacun se faisant connaître comme ayant payé….C’était tout-à-fait justifié de la part de la prof, mais, bonjour l’ambiance ! Vu le monde, sous le chapiteau chauffé par un grand soleil, l’atmosphère devenait irrespirable.. Et on était aussi chaudement vêtus que la veille… Au bout d’une heure ¼ environ, je n’en pouvais plus, et , au bord de la syncope, congestionné violemment, je dus m’arrêter, et sortir respirer. Je ne revins pas danser.
Le moral était au plus bas en ce qui concerne la country dance. Une réflexion pas du tout mal intentionnée d’Alain : « Josette s’en sort pas trop mal, et mieux que Pierre », mais tombant bien mal, faillit m’achever, et me décourager définitivement au niveau danse. La veille au soir, sous le chapiteau, j’avais dansé un peu au milieu de la foule des danseurs ( et sans Josette, fatiguée par un méchant refroidissement), n’importe comment mais joyeusement. Le samedi soir, je n’ai pas esquissé un seul pas. D’ailleurs, j’avais la tête ailleurs ; la tête et le cœur : j’étais (debout) au pied de l’estrade où se produisait une chanteuse dont je venais de connaître l’existence par Alain et Sabine : JONI HARMS . Ah , BLUE MONTANA MOON ! Comme cela me consolait de ces pas alambiqués de danses dont l’approche se révélait bien ingrate !
Alors, la COUNTRY, une MUSIQUE : OUI ! des CHANTS : OUI ! une AMBIANCE : OUI ! une ATTITUDE : MILLE FOIS OUI !!! Mais, une DANSE : HUM !!!!!!
L’heure n’avait décidément pas encore sonné….
Au retour à Salon, nous n’étions plus les mêmes : nous venions d’entrer enfin dans cet univers country, effleuré depuis tant de temps…
La Country , c’est l’Amérique, et , moins d’un mois après les EQUIBLUES de St-Agrève, le 11 SEPTEMBRE est venu nous anéantir. Nous n’oublierons jamais cet après-midi là, avec l’annonce à la radio de la 1ère attaque aérienne à NY, dans une boutique d’objets de marine du Vieux-Port, à Marseille, puis, un instant après, la vue en direct du 2ème avion-bombe dans les Twin Towers, pétrifiés devant le poste télé de l’Irish bar, toujours au Vieux Port, en compagnie des jeunes patrons, en état de choc. Et ce fut l’effondrement de la 1ère, puis de la 2ème Tour….Combien de temps sommes-nous restés là ? Les patrons nous ont offert une bière, en silence, comme dans une veillée funèbre.. Une fois sortis, nous nous sommes engouffrés dans la voiture et avons filé vers Salon , muets. Seule, la radio de bord disait l’indicible : les Tours effondrées sur leurs occupants, les centaines de pompiers new-yorkais pris au piège, et puis le Pentagone , à Washington, et puis cet avion, écrasé dans la campagne, après une lutte héroïque des passagers….et puis, et puis…..Deux jours entiers pendus aux postes, TV, radios…Pourquoi raconter tout cela, archi-connu, dans ces souvenirs anecdotiques sur mon itinéraire Country ? PARCE QUE, A PARTIR DE CE JOUR LA, NOUS NOUS SOMMES SENTIS « AMERICAINS » .CORPS ET AMES (1).
Et, comme par hasard, les choses s’accélérèrent : un élu local, amateur de musique US, et sachant nos goûts, nous apprit qu’une soirée de danse Country allait avoir lieu à Vitrolles , organisée par une association « Nord & Sud ». Hélas, ce jour-là nous n’étions pas disponibles… « It’s a long way to.. .»
Quelque temps après, je pris contact par téléphone, et j’appris qu’il se donnait des cours, notamment pour débutants dans la région, à Vitrolles, salle du Roucas. Dès le premier contact, abordé, cela va sans dire, avec la plus grande appréhension, il y eut un fort courant de sympathie. Avec le couple de dirigeants, qui nous parut très vieux (mais en réalité, bien plus jeune que moi !), à raison de nos liens respectifs avec la personne qui nous avait recommandés, mais aussi avec les 2 profs, surtout la blonde et radieuse S***, dont l’accueil chaleureux, et sans la moindre « hauteur » fut le déclencheur décisif de notre entrée dans ce monde. Rien à voir avec l’ambiance en porte-à-faux des stages de St-Agrève !
Pour sourire : le climat fut donc d’emblée euphorique. Et , dès ce 1er soir, abordé par un « cow-boy » aux airs de « dur », grosse moustache et cheveux tombant comme un gitan, sous son chapeau blanc, qui me demanda sur le ton de l’interrogatoire si on avait déjà eu un contact avec la danse country, je répondis du tac au tac : « bien sûr ! ». Et quoi ? insista le « gitan cow-boy ». Je lâchais sur un ton négligent : « Cheyenne, Tush Push, Texas Waltz » !!! Je dois dire qu’il en était resté médusé ! Et moi qui n’avais pas retenu le moindre pas de ces danses ! En réalité, je venais inconsciemment de prendre ma revanche sur ma déroute au stage d’ août à St-Agrève… Au « détriment » de…J-L*** !!!! En fait, cette réponse, une fois la surprise passée, avait dû lui plaire…
Tout se mettait en place de plus en vite : Alain et Sabine nous invitèrent à passer le réveillon du Nouvel An avec eux chez Sabine, à Paris, en présence d’un autre couple de spécialistes de la country (elle, prof de line danse ; lui, musicien). Ce fut un réveillon MEMORABLE : le petit appart de Sabine est un Musée, murs recouverts d’affiches, de posters, de… chapeaux ( oui, cela m’a inspiré, même si moi j’ai ensuite « mis le paquet » !) Ce fut une nuit 100% COUNTRY ….
Et puis, Et puis, le plus beau « cadeau » de Premier de l’An : Alain et Sabine nous proposèrent de les accompagner …EN AMERIQUE pour le mois de MAI suivant (2002), direction BRANSON – Missouri – et NASHVILLE, via MEMPHIS !!! Alors, qu’importe si, au cours de cette nuit inoubliable, on ne fit qu’esquisser maladroitement quelques pas, malgré les encouragements « méthode Coué » d’Alain ( « c’est facile ! c’est facile ! fais comme nous !... ).
JANVIER 2002, Les cours commencèrent à Vitrolles…
Mais, bien qu’ayant laissé les rênes de la présidence nationale du Cercle algérianiste à un successeur, j’avais encore de lourdes occupations au cercle, entre autres, un certain nombre de conférences programmées en divers endroits de France.. D’autre part, nous étions amenés à nous absenter assez souvent de Salon, pour des séjours relativement conséquents. Autre facteur négatif : les cours de danse avaient alors lieu le vendredi ; or, les conférences au cercle sont surtout programmées en fin de semaine : vendredi ou samedi, provoquant mon absence pour tout un W.E. par conférence donnée ….
Ainsi, au cours de ce 1er trimestre, capital, entre une occupation et une autre, j’en arrivais à manquer 3 semaines de suite… Terrible handicap, alors même que je peinais quelque peu (notamment, une quasi impossibilité de tourner sur moi-même, de faire des crochets avec le talon, etc.. En plus, à chaque leçon, la dernière ½ heure, au moins, s’effectuait dans un complet «brouillard », par épuisement physique et nerveux… J’étais parfois en proie au plus total découragement, et je dois dire que si j’ai persévéré, c’est grâce à S*** .Et aussi à son mari, A*** .
Seule danse bien maîtrisée à l’époque :…Le CHEYENNE …. Comme quoi !
Mais, le cheyenne appris, à savoir sur un rythme très lent ( et sans doute, ceci explique cela !). Parmi les danses qui me rebutaient : la CUCARATCHA ! Pourquoi ? A cause du déhanchement du début !!! Ah, comme on peut changer !!! Et je préférais bien sûr les chorégraphies proches de l’esprit western, telles celles du COW BOY STRUT,et du TEXAS STOMP..
TEMPETE D’AVRIL A AIX….
Alors que le « Voyage » approche, en avril se situe un incident révélateur :
Avec R***, un ami algérois, qui est « country » par la musique, et d’esprit western, mais surtout « relax », on a l’idée d’inviter Alain pour entendre sa fameuse conférence , dont on a entendu parler dans la Revue CMA. On invite donc Alain et Sabine , mais dans le cadre d’une association Pied-noire dirigée par cet ami, et que j’anime aussi par mes conférences historiques. Je suis perplexe sur le succès de cette initiative auprès des membres, qui portent certes Alain aux nues, mais dans un domaine tout autre que celui de la country : c’est le journaliste « engagé » comme on dit aujourd’hui (mais seulement pour l’autre côté de l’échiquier), ardent et talentueux défenseur de notre cause qu’ils connaissent, et en général, les américains, ils n’aiment pas trop, depuis qu’un certain sénateur J-F Kennedy, aida naguère le camp des fellouzes…. En plus, je vois mal l’organisation de cette soirée à la maison des rapatriés d’Aix, lieu habituel de nos rencontres…
Il faut donc partir sur l’idée de la faire dans un restaurant ami, dans la campagne aixoise, dont le président est un client assidu…Ingénument, je parle du projet à S***, pour voir si on peut en parler aux danseurs, et si cette soirée l’intéresse elle-même, pour y venir avec son mari. Car, il serait prévu de dîner, et de danser country, après la double conférence (Alain, pour l’histoire de la musique ; Sabine, pour l’histoire de la danse)..R*** m’assure de son côté de l’accord total du jeune patron du resto, d’ailleurs fils d’amis pieds-noirs membres actifs de l’ association…
Mais, S*** réserva un accueil plus que réservé à cette idée, et se retrancha derrière la nécessité de demander l’autorisation… de J-L***, ce qui me surprit (et me déplut) car je ne lui avais parlé de cette soirée qu’à titre personnel, pour un dîner au restaurant entre couples amis, la conférence étant au demeurant gratuite. RV fut finalement convenu chez elle, où l’on alla R*** et moi, reçus par S*** et son mari, pour y rencontrer J-L*** , qui vint avec sa femme.
Cette rencontre fut un total échec. R*** en sortit furieux, éprouvant une antipathie marquée envers ce J-L***, jugé matamore, bravache, et brusque sur les bords, notamment avec sa femme. En plus, son intention intéressée était manifeste. Quant à moi, j’étais déçu, préoccupé, et mal à l’aise face à l’emprise évidente de J-L*** sur Solange, le mari restant en retrait. Je n’avais pas plus apprécié J***… Et j’estimais – j’estime toujours – inadmissible que le fait pour S*** de donner des cours de danse country (cours non officiels , d’ailleurs, non réglementés) lui interdise de sortir à titre privé et perso avec des amis, au prétexte qu’au cours de la soirée, on pourrait danser country…Il y a là une intolérable pression sur la vie privée des gens, qui malheureusement ne semblait pas poser de problème à l’intéressée…
Cette soirée partait mal : le comportement du restaurateur aggrava les choses : ou plutôt celui de sa jeune femme, qui, au cours d’une visite préparatoire, nous signifia que seuls seraient passés les CD de danse qu’elle possédait, que la conférence ne devrait pas durer plus de 30 à 40 minutes, etc, etc… le tout en fonction de sa clientèle habituelle du samedi soir, dont notre groupe ne serait qu’une partie minoritaire…. Décidément, nous les initiateurs de la soirée, nous n’étions plus les maîtres du jeu ! Je dis mon pessimisme à R***, lui suggérant d’annuler ou de revoir complètement la copie.. Mais il resta optimiste, arguant de la sympathie que lui inspiraient le lieu et ses propriétaires, et faisant état de leur goût « pour les soirées à thème, en costumes »...
Ainsi partie, la soirée « promettait ». Elle tint ses promesses : elle fut détestable.
Et comme je finis par « péter les plombs », ce fut un naufrage.
Tout d’abord, la jeune patronne, sans nous prévenir, avait décidé que la conférence de nos amis n’aurait pas lieu dans les locaux fermés, mais à l’extérieur, sous une bâche pouvant abriter une vingtaine de personnes. Je ne fus pas surpris : l’esprit country et elle n’étaient pas passés par la même porte…Or, ce soir-là de début avril, le mistral soufflait en force…Dans ces conditions pénibles – on grelottait -, l’intervention d’Alain fut écourtée, et celle de Sabine réduite à 3 fois rien…Il eurent la gentillesse de ne pas nous faire de remarque, remarquant ma contrariété (R*** étant bien entendu plus « cool ») .
Le dîner suivit, après un apéro où la margarita vint tenter de nous réchauffer… On passa à la musique. Contrairement à ce que le patron nous avait dit, personne , parmi les convives extérieurs à notre groupe , n’avait le moindre signe vestimentaire « country ».Seul le patron arborait un vague chapeau « australien ». Alain et Sabine commencèrent à danser. Fort bien. Mais, sur un pas qu’ils venaient de nous montrer, à J et à moi, et que bien sûr je n’avais pas retenu, ils nous firent venir à leurs côtés, J et moi. Au bout de 2 séries, j’étais dans la panade…Aux tables voisines, d’où l’on nous regardait avec des airs goguenards, il y eut quelques exclamations ironiques…Je commençais à bouillir…De retour à notre table, la mère du patron me fit, certes sans mauvaise intention, une réflexion assez maladroite, et pour tout dire , désagréable sur la danse (elle ne connaît strictement RIEN à la line dance),fort désobligeante pour moi. Et R*** lui-même, élève non assidu et pas trop motivé par la line dance, plaisanta à son tour sans la moindre retenue…La colère montait en moi comme une lave, et j’étais au bord de la rupture.
Tout explosa lorsqu’Alain voulut me faire danser sur un air très rapide et rythmé, en me disant que c’était un cheyenne…Moi, alors, ne connaissant du cheyenne que l’air très lent sur lequel on dansait au Roucas, je crus à une astuce pour me faire aller sur la piste, quitte à me laisser perdre encore plus la face….(alors que c’était bel et bien un cheyenne, mais sur un rythme saccadé, ce que je ne découvris que bien plus tard..) : « j’explosais » soudain en public, y compris contre Alain, contre Josette, contre R***, contre la mère du patron, contre celui-ci et sa garce de femme, contre ces minables de convives parasites…et je sortis du restaurant en plein milieu du repas en claquant violemment la porte, et allais me réfugier le long d’une haie , dans le froid de cette nuit d’avril venteuse….CE FUT CAUCHEMARDESQUE !
Josette, outragée, ne vint me chercher que près d’une heure plus tard, en sortant du resto avec les autres : R*** et sa femme échangèrent quelques mots acides avec moi à propos de mon attitude. Alain et Sabine, eux, eurent la bonne grâce de ne rien me dire. Mais, j’appris au passage, qu’en quelque sorte j’avais moi-même évité le pire, car la soirée, après mon départ, n’avait pas tardé à « foirer » complètement. D’abord, mis à part 2 couples de convives « extérieurs » qui dansèrent un peu, en caricaturant d’ailleurs les attitudes country, la patronne décréta que la country « ça suffisait comme çà », et passa des musiques…style hip-hop, rap, etc, qui finirent…en danse du ventre sur des rythmes orientaux !!! C’est alors que ce qui restait de notre groupe sortit de salle.
POUR UN DESASTRE CE FUT UN DESASTRE !!!!
A la suite de cette lamentable soirée je compris la circonspection de J-L*** pour les soirées programmées dans un restaurant pratiquant des soirées « à thème », genre racoleur, histoire de faire du fric, et bien entendu éloignés de l’esprit country dont, lui, était incontestablement imprégné, comme on le constaterait plus tard…Dans des soirées de ce type, il est indispensable d’être maître du jeu.
Vis-à-vis d’Alain et Sabine, qui logeaient à la maison, et pour qui cette soirée se soldait négativement, je m’excusais de ma crise de colère par le biais de l’écriture, dans la nuit, du texte d’une ballade : « Le Blues du honky tonk », que je leur lus le lendemain matin au petit déjeuner. Alain me gratifia d’un : « voilà une réaction de countryman.. » qui signifiait que l’incident était effacé. Heureusement, car moins de 3 semaines après, nous partions ensemble pour L’AMERIQUE !!!! ( Et ce voyage entra de suite dans la Légende.)
Avec le recul, au-delà du mauvais souvenir, un certain nombre d’enseignements précieux peuvent être tirés de cette aventure ». En outre, et ce n’est pas la moindre conclusion, ce fut une étape involontaire mais importante dans mon entrée en profondeur dans l’univers de la Country.
(1) c’est, si j’ose dire, « ma part d’Amérique ». Je reste conscient qu’il y a à côté, et même contre cette Amérique-là, une « autre Amérique » dont je sais les dangers et les méfaits.
Le manuscrit, à l’évidence inachevé, s’arrête là. Il dut être entrepris vers 2006, en vue de retracer tout un itinéraire qui était alors sur le point de parvenir à son terme pour la danse, après avoir connu un embrasement inouï entre 2002 et 2005, mais se poursuivant sur le plan musical, avec la fréquentation, ininterrompue depuis 2001, des Festivals de Country, en premier lieu les Equiblues de St-Agrève, et l’incomparable festival de Craponne s/Arzon. Peut-être, un jour, je lui donnerai une suite, car ce fut une Belle histoire…